Bien traduire : faut-il traquer les anglicismes ?

Bien traduire : faut-il traquer les anglicismes ?

L’actu

Les anglicismes se retrouvent, une nouvelle fois, dans le viseur de l’Académie française après la publication d’un rapport intitulé « Pour que les institutions françaises parlent français », le 15 février dernier. L’institution souhaite ainsi « mettre en évidence l’évolution sensible et préoccupante de la langue française que l’on constate dans l’ensemble de la communication institutionnelle ». Après une vingtaine de pages d’exemples d’anglicismes divers et variés employés par des institutions, des collectivités ou encore des entreprises publiques, le rapport entrevoit des « conséquences d’une certaine gravité sur la syntaxe et la structure même du français ». Les conséquences les plus saillantes selon les immortels ? Un « risque d’appauvrissement du lexique français » et « une discrimination croissante entre les publics  ». Le rapport conclut en insistant sur « la gravité » et « l’urgence de la situation ». Vous l’aurez compris, pour les gardiens de la langue française, le sujet est tranché : les anglicismes, c’est non ! 

En débat

Il faut bien admettre que, du fait de la mondialisation des échanges, les anglicismes s’immiscent toujours plus dans notre vie et dans notre langage courant. Si certains secteurs comme le marketing et la finance sont nettement plus concernés que d’autres, on ne compte plus les mots anglais qui font partie de notre quotidien : digital, challenge, mail, week-end… 

Traduction et anglicismes en questions

Lorsque votre métier est de traduire, et notamment de l’anglais vers le français, comment savoir quand il est pertinent d’utiliser un anglicisme ? Quels sont les usages ? Sur quelles ressources s’appuyer pour utiliser le bon terme ? Quelle doit être la ligne de conduite du traducteur ou de la traductrice ? 

La loi Toubon, une obligation légale à connaître

En France, il existe une loi dont la seule raison d’être est de protéger le patrimoine linguistique français, et par extension, le consommateur. Elle indique que les informations relatives aux produits et aux services de consommation doivent être rédigées en langue française (voir l’article 2). Elle précise même que ces « dispositions s’appliquent à toute publicité écrite, parlée ou audiovisuelle ». Elle encadre de la même manière toute communication faite sur la voie publique, dans un lieu public ou dans les transports en commun (voir l’article 3).

Dans la pratique : une certaine tolérance, mais la méfiance reste de mise…

En dépit de la loi Toubon, l’État français utilise régulièrement des anglicismes dans sa communication en évoquant, entre autres, la french tech, les startups ou encore le plan national santé et environnement « One Health »… En conséquence, une association s’est récemment attaquée à plusieurs municipalités afin de faire supprimer des slogans tels que « Open Roubaix » ou « #ILoveNice », avec succès dans le cas de la ville de Roubaix, alors que des plaintes concernant d’autres municipalités sont toujours en cours de jugement. Il est bon d’avoir ce genre de cas  en tête si vous traduisez des contenus apposés sur l’espace public ou pour des collectivités et entreprises publiques. Au-delà de ces exemples malheureux, dans la pratique, lorsque la langue française leur donne déjà tous les moyens d’exprimer une idée, les traducteurs et les traductrices préfèrent le plus souvent éviter d’employer des anglicismes. Certains sont tout juste tolérés.

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La loi du client et les attentes du lecteur

En conclusion, si, en tant que traducteur, vous devrez toujours vous demander s’il existe un équivalent en français compréhensible à ce que vous avez identifié comme un anglicisme, il ne faut pas oublier que vos choix de traduction seront avant tout guidés par les attentes de votre client et de votre public cible. Si vous traduisez un document interne destiné à une équipe de développeurs, ils s’attendront à ce que vous parliez leur langage, avec son lot d’anglicismes. De la même manière, vous prendrez en compte les instructions spécifiques de votre client à ce sujet, ou, à défaut, sa façon habituelle de s’exprimer (tonalité, termes…). Si celui-ci est une entreprise innovante évoluant dans le secteur de la finance, et que l’utilisation de nombreux termes d’origine anglaise est inscrite dans son ADN, il sera de bon ton de respecter, dans vos traductions, ses préférences lexicales.

Quelques techniques pour les débutants

  • Pour trouver un équivalent français à un anglicisme, tapez le mot anglais + anglicisme dans Google.
  • Pour savoir si un équivalent français est correct et utilisé, tapez-le dans Google et voyez combien de pages de résultats sortent. En tant que linguiste, ce guide vous sera fort utile, pour apprendre à bien rechercher sur le web.
  • Pour identifier des équivalents français qui relatent bien le sens voulu, utilisez les dictionnaires de synonymes (par exemple, Crisco).
  • Pour garder un œil sur les recommandations de l’Académie, vous pouvez consulter la section Néologismes et anglicismes de la rubrique Dire, ne pas dire de leur site web. 

Quelques liens pour prolonger la réflexion (ou rire un peu)


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